Cours d'histoire BAC série S

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La colonisation européenne et le système colonial

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1 Les Européens à la conquête du monde (1850 – 1914)
 
1.1 Le dynamisme européen avant 1914
 
En raison d’une croissance démographique soutenue, le Vieux Continent regorge d’hommes : de 1850 à 1914, près de 50 millions d’Européens partent vers les pays neufs, attirés principalement par les Etats-Unis, mais aussi par le Brésil, l’Argentine ou les colonies de peuplement britanniques. Ce mouvement de fond diffuse les langues, les cultures et les valeurs des nations européennes.
L’Europe tire aussi largement parti de sa maîtrise technique : les progrès des moyens de transports et de communication, de la navigation à vapeur au télégraphe, unifient l’espace mondial ; le percement des grands canaux transocéaniques, Suez (1869) et Panama (1914), raccourcissent spectaculairement les distances. La supériorité militaire et les progrès de l’encadrement sanitaire de colons (quinine contre le paludisme) constituent des atouts décisifs.
La puissance économique et financière de l’Europe occidentale lui permet de dominer largement le commerce mondial (plus de 60 % des échanges mondiaux en 1914) et d’exporter ses capitaux dans le monde entier, qu’il s’agisse d’investir directement dans l’économie ou de prêter à des Etats lourdement endettés, comme l’Empire ottoman. Cet impérialisme, dénoncé par les socialistes, est l’expression la plus nette de la prépondérance européenne. La livre sterling est alors la monnaie des règlements internationaux.
 
1.2 Le triomphe de l’idéal colonial
 
L’expansion européenne avait marqué un temps d’arrêt au début du XIXe siècle, avec l’indépendance des Etats-Unis (1783) et des anciennes colonies espagnoles. Critiquée par les libéraux, apparemment condamnée par l’abolition de la traite et de l’esclavage, la colonisation retrouve de nombreux partisans dans la deuxième moitié du siècle. Les explorateurs multiplient  les voyages de découverte, comme ceux de Livingstone, à la recherche des mystérieuses sources du Nil. Les missionnaires partent évangéliser les peuples indigènes. Militaires, chambres de commerce et sociétés de géographie constituent de puissants groupes de pression qui encouragent les explorations, organisent des expositions et diffusent des récits de voyage enthousiastes, afin de pousser les hommes politiques à rejoindre le « parti colonial » et de convaincre les opinions, plus indifférentes que réticentes, des bienfaits de l’expansion.
Les arguments avancés sont donc de nature très diverse : la recherche de marchés, la quête de placements sûrs, l’orgueil national, les préoccupations stratégiques, et, par-dessus tout, la conviction largement partagée que les nations d’Europe ont une responsabilité vis-à-vis de peuples « en retard », voire « inférieurs ». L’utopie coloniale, inspirée souvent par un idéal généreux et par de bons sentiments, repose sur de véritables contradictions : la lutte contre l’esclavage, ce « commerce honteux » qui sévit en Afrique, légitime les interventions des puissances européennes comme celle du roi des Belges Léopold II au Congo, mais débouche sur la servitude généralisée du continent !
Au nom de cette mission émancipatrice, avancée en France aussi bien par les Eglises que par les républicains, les colonies ne sont pas seulement une « bonne affaire », mais aussi un « fardeau » ou un « devoir civilisateur ». Le discours colonial, nourri de préjugés racistes, de mythes et d’illusions, est donc propre à séduire et ne soulève guère de réserves avant 1914. Relayé par la presse, la littérature et l’école, il s’affirme comme une composante majeure des sociétés européennes et entretient le sentiment nationaliste.
 
2 De la domination au partage (1850 – 1914)
 
2.1 Les étapes de l’expansion
 
L’expansion est longtemps le fait d’initiatives isolées, les Etats répugnant à s’engager, hormis quelques exceptions notables, comme la France, en Algérie dès 1830, ou la Grande-Bretagne en Nouvelle-Zélande en 1840. La rivalité ancienne entre ces deux puissances conduit à privilégier la quête de points d’appui destinés avant tout à s’assurer le contrôle des mers. Les Anglais, présents au Cap et à Aden, contrôlent la route des Indes et se tournent vers l’Extrême-Orient (Singapour, 1819 ; Hong-Kong, 1842). Les Français renforcent leur présence en Afrique de l’Ouest (Faidherbe au Sénégal, 1854) et dans le Pacifique (Marquises, 1842 ; Nouvelle-Calédonie, 1853) et s’établissent à Saigon et en Cochinchine (1862).
L’expansion change de nature vers 1880. Les rivalités grandissantes entre puissances, les difficultés économiques entraînées par la Grande Dépression suscitent l’adoption de politiques résolument colonialistes. Le Britannique Joseph Chamberlain et le Français Jules Ferry se font les porte-parole d’une conquête systématique. Alors que les Français mettent la main sur la Tunisie en 1881, les Britanniques occupent l’Egypte en 1882 afin de contrôler la nouvelle route des Indes ouverte par le canal de Suez. De nouvelles puissances, comme l’Allemagne ou l’Italie, revendiquent leur « place au soleil ». Après la conférence de Berlin qui s’achève en février 1885, la compétition s’accélère et une vague colonisatrice submerge l’Afrique. Seule l’Amérique, en raison de la doctrine Monroe, est épargnée.
Le partage colonial est achevé pour l’essentiel en 1914. Il est accompagné de terribles violences contre les indigènes, les confiscations de terres et les déplacements de peuples s’ajoutant aux massacres de la conquête. Il a provoqué des heurts entre puissances et alimenté le nationalisme. Le rêve français d’un empire qui irait de Dakar à Djibouti se heurte au projet anglais de réunir dans un même ensemble les territoires du Caire au Cap : en 1898, à Fachoda, sur le Nil, les Français doivent reculer. La France et l’Allemagne s’affrontent à propos du Maroc : en 1905 – 1906 (crise de Tanger) et 1911 (crise d’Agadir), on est au bord de la guerre.
 
2.2 Colonialisme ou impérialisme
 
La colonisation constitue la forme la plus visible de la domination européenne. Des régions entières passent sous le contrôle direct des puissances et sont administrées depuis Paris, Londres ou Berlin. Quand la puissance coloniale juge préférable de maintenir la fiction d’une certaine autonomie locale, elle recourt au régime du protectorat, comme en Tunisie, au Cambodge ou en Egypte. Mais, dans tous les cas, elle conserve, par le biais d’un gouverneur ou d’un ministre-résident, l’essentiel des pouvoirs.
Certains pays ne peuvent pas être placés sous tutelle, du fait de leur taille, leur histoire ou l’âpreté des rivalités qu’ils suscitent : c’est le cas de l’Empire Ottoman, de la Chine ou de l’Amérique latine. Il s’agit alors de profiter de la supériorité technique et financière pour obtenir une influence déterminante, comme le font les Britanniques en Amérique du Sud. Des pans entiers de l’économie passent sous le contrôle des firmes européennes (mines, plantations). Cet impérialisme conduit également à une mainmise étrangère sur la Chine, partagée en véritables zones d’influence en 1895 (« Break up of China ») ainsi qu’à des ententes au Moyen-Orient sur les concessions ferroviaires et l’exploitation pétrolière.
 
3 Le système colonial
 
3.1 L’apogée de la colonisation
 
En 1939, l’Empire Britannique est de loin le plus important, tant par la taille (30 millions de km2) que par la population (500 millions d’habitants). S’étendant sur les cinq continents, il comprend les territoires de population blanche, les dominions, associés à la Grande-Bretagne dans le cadre du Commonwealth. Ailleurs, la politique anglaise se fonde sur le pragmatisme. Les statuts varient, mais l’objectif est partout le même : s’appuyer sur les autorités locales pour alléger le coût de l’administration. Cette politique d’association, ou indirect rule, est en particulier à l’œuvre en Inde, joyau de l’Empire.
L’Empire Français s’étend sur 10 millions de km2 et ne compte que 70 millions d’habitants. Il n’y a pas de colonie de peuplement même si l’Algérie comporte une forte minorité de population européenne et est, pour cette raison, divisée en départements et rattachée directement à la métropole. Partout, la politique officielle repose sur l’assimilation et sur une administration centralisée dans le cadre de grands ensembles territoriaux (AOF et AEF en Afrique, Union indochinoise en Asie).
Les autres empires sont beaucoup plus petits, même si l’Italie a pu prétendre son domaine africain par la conquête de l’Ethiopie en 1936. Leur importance économique est très inégale, mais le Congo belge ou l’Indonésie néerlandaise ont largement profité à leurs métropoles. Quel que soit le pays,  les années trente voient triompher l’idéologie coloniale : à travers la littérature et le cinéma, l’école, la publicité ou la carte postale, s’invente la figure de l’indigène, ce grand enfant que l’Europe se doit de guider et d’encadrer. L’Exposition coloniale internationale de Vincennes en 1931 constitue l’apogée de cette vision et place, tardivement, les empires au cœur de l’imaginaire des Européens.
 
3.2 L’exploitation des colonies
 
Le discours colonial souligne les progrès réalisés, qu’il s’agisse  de l’élimination des maladies endémiques, de l’encadrement scolaire, œuvre des missionnaires le plus souvent, ou des efforts d’équipement ferroviaire et portuaire. Toutefois, les résultats d’ensemble paraissent bien maigres, tant la logique de la mise en valeur reste dominée par les intérêts des colons et les besoins des métropoles.
Les cultures vivrières sont sacrifiées au profit des denrées tropicales et des cultures industrielles : l’Inde fournit coton et thé ; l’Indochine et l’Indonésie, le caoutchouc ; le Congo belge et la Rhodésie, le cuivre ; le Maroc, les phosphates, etc. En retour, les colonies doivent absorber les produits fabriqués par la métropole, la récession des années trente aggravant cette dépendance avec l’adoption de la « préférence impériale ».
 
3.3 Des sociétés bouleversées
 
Les sociétés indigènes ont été bouleversées par la « modernité » européenne. Les communautés villageoises sont les premières victimes du système colonial. Malgré les campagnes humanitaires, le travail forcé et les réquisitions de main-d’œuvre s’accompagnent de violences dans le cadre des grandes plantations en Afrique noire ou en Indochine. Nombre de paysans, traumatisés par la brutalité des changements, chassés de leurs terres par la concentration, s’entassent dans les quartiers indigènes des villes coloniales et forment un prolétariat misérable.
Le pouvoir colonial a suscité de nouvelles élites : petits fonctionnaires, journalistes, médecins ou entrepreneurs sont souvent attachés à l’ordre colonial, mais, déchirés entre deux cultures, ils souffrent du mépris et du racisme dont les entourent les colons, songent à la rupture avec la métropole et se tournent de plus en plus vers le nationalisme.
 
4 Une domination menacée
 
4.1 La remise en cause de la puissance européenne
 
En 1918, les deux principales puissances coloniales, la France et la Grande-Bretagne, se félicitent de la contribution de leur empire à la victoire. L’opinion dans les métropoles se persuade que leur mise en valeur est un gage de prospérité durable. Toutefois, les « quatorze points » du président Wilson ont fait valoir le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes  et la SDN, en confiant aux vainqueurs des mandats provisoires sur les anciennes colonies allemandes et ottomanes, souligne qu’il s’agit d’une étape sur la voie de leur émancipation.
La domination européenne n’est plus sans partage. Les Etats-Unis sont devenus la première puissance mondiale et ils condamnent la colonisation lui préférant un impérialisme informel, en particulier en Amérique latine. L’URSS et l’internationale communiste multiplient les appels aux « peuples opprimés ». L’expansion du Japon est souvent accueillie avec enthousiasme en Asie même si leur exaltation de l’union des peuples asiatiques masque leurs ambitions impérialistes.
 
4.2 La montée des contestations internes
 
Dans ces conditions, les élites indigènes comprennent mal que l’égalité civique leur soit toujours refusée. Formées dans les écoles européennes ou dans les séminaires, elles s’appuient sur les valeurs occidentales pour réclamer, sinon l’indépendance, du moins une véritable autonomie, proche de celle dont jouissent déjà les dominions. Or, les métropoles se montrent sourdes à ces attentes. Rares sont ceux, qui, en dehors des communistes, dénoncent cet aveuglement.
« Etrangers dans leur propre pays » (Gandhi), confrontés à une exploitation souvent brutale, les peuples contestent l’ordre colonial. Certains courants se réclament des valeurs traditionnelles, d’autres se tournent vers la religion, comme les Frères musulmans, d’autres encore placent leurs espoirs dans le panarabisme, ou dans le communisme, comme Hô Chi Minh en Indochine.
 
4.3 Les premiers craquements des empires
 
La France doit faire face en 1925 au soulèvement du Rif marocain puis en 1930 à des révoltes au Tonkin. Pourtant, elle n’oppose au mécontentement que des discours généreux et de timides réformes contrariées par l’aveuglement des colons. Ainsi, le projet Blum-Violette visant à favoriser l’accès à la citoyenneté des musulmans algériens se heurte à l’intransigeance des Européens (1/10 de la population). Les élites basculent peu à peu dans une opposition ouverte et rejoignent des mouvements nationalistes radicaux comme le Néo-Destour de Bourguiba en Tunisie ou le Parti du peuple algérien de Messali Hadj.
Dans l’Empire britannique, les premières fissures apparaissent en Inde. Les notables du parti du Congrès se rapprochent de Gandhi qui rallie, grâce à ses méthodes non violentes, le peuple à la cause indépendantiste. Confronté à la désobéissance civile, Londres institue en 1935 un protectorat, mais ce statut vient trop tard et l’Inde est au bord de la sécession quand la Seconde Guerre mondiale commence.
Au Proche-Orient, Français et Anglais se sont vus attribuer en 1920 par la SDN des mandats sur les ruines de l’Empire ottoman. Les Français  tergiversent au Liban et en Syrie et doivent affronter plusieurs révoltes de la population arabe. Les Britanniques font preuve de réalisme et accordent l’indépendance à l’Irak en 1932 puis à leur protectorat égyptien en 1936. Toutefois, la déclaration Balfour de 1917 ayant encouragé l’immigration juive en Palestine, les Britanniques sont de plus en plus impliqués dans les tensions entre les communautés juive et arabe. En 1937, alors que la situation est devenue explosive, un rapport britannique envisage pour la première fois un partage de la Palestine.


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