Par Thierry Albertin - 10/04/2008 - Politique - Le bout du tunnel

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Le bout du tunnel

 

 La fin de la prépa approche, dans deux semaines, les concours débuteront, aboutissement de deux années de travail, de travail inutile tant la façon dont nous préparons les concours fait de nous des machines à ingurgiter des tas de connaissances sans les comprendre.

En prépa, vous passez des semaines de folie avec un nombre d'heures de cours énorme qui ne laisse aucune place au travail personnel. Vous avez énormément de travail chaque soir, et vous ne pouvez faire que ça. Impossible de prendre le temps de réfléchir à ce que l'on fait, d'essayer de trouver une logique dans l'enchaînement des chapitres, de consulter par curiosité des livres pour avoir une autre vision de ce que l'on apprend.

En mathématiques, le cours n'a aucune logique. Vous écrivez ou lisez (selon les méthodes de travail des professeurs), une sucession de définitions et de "propositions". Dix pages, vingt pages, trente pages absolument sans intérêt si ce n'est d'avoir de quoi se remplir le crâne suffisamment jusqu'à la fin de nos jours. Pas de place à l'observation, à la recherche, on vous déballe des propriétés que vous vous devez de connaître sous peine de vous faire pourrir et de passer pour quelqu'un qui n'apprend pas son cours. Quelqu'un m'expliquera-t-il comment un cerveau normal peut retenir tout ça en si peu de temps. Ah oui, nous sommes sensés comprendre ces propriétés, savoir les redémontrer, et ainsi savoir les restituer... Mais on ne compte pas les démonstrations bâclées en classe, oubliées délibérément parce que l'on manque de temps ! Et oui, c'est toujours l'étalement d'une montagne de connaissances qui prime sur la compréhension, faisons-en le plus possible, même si c'est mal fait, telle devrait être la devise des classes préparatoires scientifiques.

En physique, ce n'est guère mieux, et c'est d'ailleurs encore plus marrant, car les programmes officiels mêmes interdisent souvent de donner tout sens physique à un phénomène observé. Ainsi on fait de l'électrocinétique qui est totalement dénuée de sens physique. Il ne s'agit que d'un enchaînement de calculs énormes qui vous remplissent des pages et des pages. Il est en de même pour tous les autres domaines étudiés. La physique en classes préparatoires n'est qu'une façon de vous faire faire des maths sans vous dire que c'est des maths.

Et dire que les étudiants de prépas sont souvent considérés (et se considèrent) comme l'élite du pays. A en voir la façon dont on les fait travailler, cela fait peur. Cela va devenir nos ingénieurs, nos professeurs, parfois nos hommes politiques... Les deux années de prépa (ou trois) nous auront appris à écouter bêtement ce que nous raccontent nos professeurs. Ils auraient pu tout inventer, nous les aurions tous cru sans le moindre doute. Au lieu de faire des étudiants qui y entrent des personnes qui ont un but, la prépa les transforme en moutons qui sont incapables de penser et d'agir par eux-mêmes. Nous intégrerons sûrement tous une école, nous réussirons sûrement tous, mais la prépa aura créé une collection de robots inutiles pour la société, au lieu de développer notre sens de l'initiative, notre curiosité et notre ouverture d'esprit. C'est malheureusement ça l'"élite" de la France.

Quant à moi, l'expérience de la prépa ne m'aura pas été inutile, même si j'aurais traversé deux années de "vide intellectuel". Je suis là pour dire à tous ceux qui veulent aller en prépa qu'ils s'engagent dans un piège, dans une spirale dangereuse qui les mènera à l'obscurantisme.

Ce n'est pas terminé pour moi, malheureusement, il reste encore des concours à passer, à retourner au lycée pour préparer les oraux en cas d'admissibilité, à passer ces oraux, mais le fait d'avoir deux semaines pour travailler enfin librement, sans devoirs établis par les professeurs, sans pression de devoir rendre tout un tas de devoirs des plus inutiles, me procure une joie immense. Le bout du tunnel approche, dans quelques mois, la prépa sera définitivement loin derrière, mais je crains que les dégâts qu'elle a causés ne disparaissent jamais !

Thierry Albertin

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